Entretien avec Florent Levavasseur, directeur conseil, Utopies, France et fondateur MBA Communication RSE.
Après avoir animé la conférence « Créativité, culture et sport – L’émotion au service de la transformation sociétale ». Florent Levavasseur revient sur les objectifs de transition environnementale de sa société, et sur l’importance de l’engagement associatif et personnel dans le domaine du travail.
Au croisement de la culture, du divertissement, du sport, et de l’engagement social, UTOPIE vise à l’incitation les entreprises à intégrer les enjeux sociaux et environnementaux à leur stratégie de développement, tout en les sensibilisant aux grands enjeux et problématiques mondiales.
Que vous a appris votre expérience de terrain, notamment au sein d’ONG, et en quoi consiste l’action 1% for the planet ?
« Elle a été assez variée à Planète Urgence en 2004, j’ai créé des missions humanitaires, notamment des missions sociales en Inde, pays connaissant de nombreuses difficultés sociales. J’ai donc proposé à l’ONG de créer ces missions, comme la mise en place de congés solidaires pour les employés voulant se rendre utiles et mettre en pratique leurs compétences de manière volontaire pendant leurs vacances. Cela passe par la rencontre entre la direction des associations et le lien avec les futurs volontaires. Cela m’a amené à une réelle compréhension de l’urgence sociale près de cette population et l’intérêt pour des employés d’être utiles. Cela a renforcé cette connaissance sur le volet social et environnemental. J’ai voyagé pendant cinq mois à la rencontre des ambassadeurs du mouvement à Vancouver, à Montréal, à San Diego, et cela m’a ouvert le champ des possibilités, en comprenant l’engagement d’entrepreneurs pionniers, en rencontrant des gens sur le terrain qui m’expliquent leur engagement, leur modèle économique.
Ces expériences en ONG m’ont nourri, en plus de mes expériences en entreprise, pour rejoindre UTOPIE, un cabinet de conseil sur les stratégies de développement durable.
L’ONG 1% for the planet permet de financer les associations environnementales en faisant payer 1 % du chiffre d’affaires aux entreprises qui le veulent bien, c’est de la fiscalité volontaire. En contrepartie, elles obtiennent le logo et montrent ainsi à leurs clients qu’elles participent, à 1 % de leur CA, au financement d’ONG environnementales qui manquent cruellement de besoins. Étant conscientes qu’elles polluent par leurs activités et donc elles vont d’elles-mêmes financer des ONG environnementales et tenter de compenser, tenter de contribuer. »
À la suite de ces expériences, vous avez créé le premier MBA spécialisé Communication, et développement durable. En quoi cette création participe-t-elle à la fameuse transition vers un modèle plus durable ?
« C’était il y a quatre ans, on m’a demandé de fonder ce MBA pour former la nouvelle génération d’étudiants. C’est vraiment pour faire en sorte que les étudiants sortent des écoles de communication ou journalisme et puissent avoir les réflexes de l’entreprise dans leur métier, les former, donner de l’épaisseur aux étudiants sur le fond et la forme de la logique RSE.
La compétence de communication, créativité et l’esprit critique font partie des grandes compétences qui vont permettre de faire face à la montée en puissance des machines et de l’IA, mais aussi, à mon sens, d’intégrer les transitions dans les médias pour pouvoir être créatif et pouvoir bien communiquer entre nous.
Dans mon métier chez UTOPIE, on va mener des stratégies d’impact auprès des entreprises ou des organisateurs d’événements sportifs pour pouvoir les rendre plus responsables comme baisser leur intensité carbone, calculer les bilans carbone, mais aussi améliorer leur ancrage local et organiser plus de cohésion dans leur territoire. Nous sommes un think tank, ce sont les entreprises qui nous appellent pour obtenir des missions pionnières sur ces sujets. Notre objectif est de répondre à leur besoin du moment en leur proposant des stratégies climatiques. Nous faisons pour cela appel à des experts internes et associés pour que nos recommandations soient les plus précises possible. »
Avez-vous des exemples de lieux qui suscitent l’émotion et incitent à se rendre acteur du changement ?
« Pendant quelques années, j’étais dans l’espace Darwin à Bordeaux, qui est un tiers lieu hybride qui mêle énormément d’activités différentes. C’étaient des anciennes friches qui ont été remodelées pour accueillir du coworking, mais aussi un grand restaurant bio local, à terme, une boulangerie, de la brasserie de bière, et l’accueil de réfugiés avec des personnes qui les accueillent. Le soir, ça se transforme en événements culturels. Tout se mélange, et cela incite à l’innovation, à la responsabilité, et cette hybridation des usages dans un lieu urbain, est très intéressante puisqu’on utilise mieux le mètre carré urbain. On évite de détruire.
On peut aussi citer le Cocon, qui offre la mutualisation des usages entre crèches et entrepreneurs, c’est-à-dire les jeunes parents. Ils ont une crèche juste à côté de leur espace de coworking, cela a donc beaucoup de vertus, notamment au niveau de la sérénité, du travail, et le lien des premières années qui est très important entre l’enfant et le parent pour sa croissance. Ce type de structure favorise la sérénité des jeunes parents qui peut parfois être compliquée à trouver. »
Face à l’écoanxiété présente chez les plus jeunes générations, y a-t-il des stratégies d’accompagnement, des interventions faites par votre entreprise ?
« C’est vraiment important de sensibiliser les jeunes à ces sujets. Il y a beaucoup de mouvements qui essayent de chambouler l’ordre établi avec des jeunes activistes plus ou moins radicaux. On parle d’activisme de mouvement. « Il faut chambouler l’ordre établi »
Certains de ces acteurs comme les influenceurs doivent être un moteur de mobilisation, de la sensibilisation et pas juste dans la promotion de leur consommation. Donc s’il y a de l’écoanxiété, la meilleure manière de faire, c’est d’agir, trouver son point d’action, pour dire que l’on contribue un peu à la tâche, et ne pas juste être des spectateurs. C’est ce qui m’anime depuis déjà dix ans, d’agir pour le développement durable ça me rend heureux. Je n’ai pas envie de juste travailler, j’ai envie de contribuer à changer le monde à mon échelle. Les structures de travail permettent de plus en plus d’inclure cette question environnementale via les équipes RSE. »
Propos recueillis par Leela Nedelec